Le 1er dĂ©cembre 1956, Alain Mimoun se couvrait dâor olympique en remportant le Marathon aux Jeux Olympiques de Melbourne, en 2 heures et 25 minutes, devant la lĂ©gende Emil Zatopek, son ami, son plus fidĂšle adversaire... Plus de 60 ans aprĂšs, il est parfois encore considĂ©rĂ© comme LE sportif français du 20Ăšme siĂšcle.
Câest littĂ©ralement un dĂ©luge de titres et dâhonneurs qui pleut lorsque l'on Ă©voque Alain Mimoun : Ă©lu Champion des Champions par le journal LâĂquipe en 1949 et 1956, Champion des Champions de LĂ©gende (LâĂquipe, 2012), athlĂšte français du siĂšcle (revue AthlĂ©tisme, 1999), quatre LĂ©gions dâHonneur dĂ©cernĂ©es par quatre prĂ©sidents diffĂ©rents (RenĂ© Coty en 1956, Georges Pompidou en 1972, Jacques Chirac en 1999, Nicolas Sarkozy en 2008)... đ
Son histoire sportive aurait pourtant pu ne jamais ĂȘtre Ă©crite lorsqu'on sait que le natif de MaĂŻder en AlgĂ©rie a failli perdre une jambe en 1944, en dĂ©fendant la France lors de la campagne dâItalie đźđč... OpĂ©rĂ© Ă Naples, il reprend aprĂšs la seconde guerre mondiale le fil de sa carriĂšre sportive, dĂ©butĂ©e en 1940 Ă Bourg-en-Bresse alors quâil avait 19 ans đââïž. TrĂšs vite, il Ă©crase la concurrence avec le club du Racing Club de France au sein duquel il signa en 1946. DĂšs lâannĂ©e suivante, il est titrĂ© Champion de France sur le 5 000 mĂštres et 10 000 mĂštres ... đ
C'est alors une avalanche de titres qui va s'en suivre, et attention ça brĂ»le les yeux : 7 fois champion de France du 5 000 mĂštres, 9 fois champion de France du 10 000 mĂštres, 5 fois champion de France de Cross Country đ±. Au total, lâathlĂšte au grand cĆur rĂ©colte pas moins de 32 titres nationaux entre 1947 et 1956... Mimoun adore la France, la France adore Mimoun. Il devient incontournable. âAllez Mimounâ rentre dans le langage commun quand on encourage les enfants... Alors quâil domine la concurrence sur le territoire national, Alain Mimoun tombe sur un os nommĂ© Zatopek lors des compĂ©titions internationales. Et ces deux-lĂ vont se tirer la bourre pendant plusieurs annĂ©es. MalgrĂ© la concurrence, ils deviennent rapidement amis, un grand respect s'instaurant entre les deux hommes rĂ©putĂ©s pour leur courage et leur abnĂ©gation đ€. Aux JO de Londres (1948) et aux JO dâHelsinki (1954), le français doit se âcontenterâ de trois mĂ©dailles dâargent, toujours derriĂšre celui que lâon surnomme la âlocomotive tchĂšqueâ ! Emil Zatopek est un immense champion, pour certains le plus grand coureur de tous les temps... đȘ
Pourtant, aux Jeux Olympiques de Melbourne 1956, Alain Mimoun y croit, comme toujours. Son meilleur ennemi nâest pas dans la forme de sa vie, opĂ©rĂ© dâune hernie un mois auparavant đ€. Lui est affutĂ© comme jamais, portĂ© par la naissance de sa fille Olympe le jour prĂ©cĂ©dent... Chose incroyable, ce marathon est le premier disputĂ© par Mimoun dans sa carriĂšre, lui qui Ă©tait plutĂŽt un spĂ©cialiste du 5 km et 10 km ! Ainsi, le 1er dĂ©cembre Ă 15h13, le numĂ©ro 13 sâĂ©lance pour les 42,195 km du marathon, sous une chaleur Ă©crasante đ„”. Ă la moitiĂ© du parcours, il se retrouve seul en tĂȘte et ne lĂąchera plus les commandes de la course. Zatopek est distancĂ©. LâĂ©motion est immense quand il pĂ©nĂštre Ă 17h37 dans le stade olympique de Melbourne, oĂč 120 000 spectateurs attendent le vainqueur đ! Alain Mimoun se drape enfin dâor olympique đ„.
Zatopek, qui termine ce jour-lĂ sixiĂšme, est heureux pour son ami quand il apprend sa victoire. La lĂ©gende est nĂ©e et elle est toujours vivante malgrĂ© son dĂ©cĂšs le 27 juin 2013, Ă lâĂąge de 92 ans. Aujourdâhui, plus de 50 stades portent le nom de cet immense champion partout en France. Mais au-delĂ des plaques et des commĂ©morations, câest sa gĂ©nĂ©rositĂ© devant lâeffort et ses valeurs quâil faut continuer Ă faire vivre. đ
En Australie, quarante aprĂšs les Jeux Olympiques de Melbourne, j'ai Ă©tĂ© reçu comme un chef d'Ătat. On m'a mĂȘme proposĂ© le passeport australien.
Peut-ĂȘtre quâun jour lâimpensable se produira : quâAlain Mimoun ait un hĂ©ritier...
Charles-Emmanuel Pean
Sources
La plateforme nouvelle génération qui permet à tous les coureurs quel que soit leur niveau, de (re)découvrir le territoire et le patrimoine français, en trouvant les courses qui leur correspondent.