Le Marathon d'Amsterdam
Nous sommes le 15 octobre 2023, dans une ville bien connue non seulement pour son charme, mais aussi pour sa renommĂ©e dans la chanson française : Amsterdam ! Ce jour-lĂ , des milliers de coureurs venus des quatre coins du monde s'apprĂȘtent Ă s'Ă©lancer pour un pĂ©riple de 42,195 km dans les rues de la capitale hollandaise. Parmi eux, Juliette, plus connue sur Instagram sous le nom de "Douapita" ! Juliette est une aventuriĂšre et sportive qui partage ses expĂ©riences sur les rĂ©seaux sociaux ! Deux semaines aprĂšs, elle nous raconte son Marathon d'Amsterdam.
Ăa fait 15 min que je fais la queue pour les WC de mon sas de dĂ©part. Le Marathon d'Amsterdam âââ va commencer et il y a encore 10 personnes devant moi. Puis, je vois les gens avancer... đł Ă 9h25, ça y est, le dĂ©part du sas vert 4h-4h30 est lancĂ© ! "Tant-pis ma grande, tu pisseras plus tard !", je me dis. Je suis donc le mouvement vers le dĂ©part et... LETâS GO ! đââïž
D'un coup, il y a un grand soleil âïž. Le temps est en totale opposition avec les averses de grĂȘle de 20 min plus tĂŽt. Je dĂ©cide de partir sans mes Ă©couteurs pour profiter de lâambiance, en sachant que je les mettrai probablement pendant le long passage au bord du canal đđ¶.
Le dĂ©marrage est compliquĂ©, je piĂ©tine Ă cause de la densitĂ© de coureurs. Jâessaye alors de me frayer un chemin et dâaccĂ©lĂ©rer dĂšs que des passages se crĂ©ent, ce qui fait que ma vitesse varie comme un accordĂ©on đŹ. Je garde mon objectif en tĂȘte : je dois faire entre 27 minutes 35 secondes et 28 minutes 26 secondes tous les 5 km pour sĂ©curiser le pallier des 4h. Jâavance, tant bien que mal, en essayant de ne pas me cramer đ„ avec des accĂ©lĂ©rations inutiles.
Il faut savoir que le dĂ©but et la fin du parcours sont communs. Alors, mĂȘme si le parc que lâon traverse est trĂšs mignon, les panneaux "40 km" me stressent un tantinet đ . JâĂ©vite donc de penser au fait que je serai au mĂȘme point dans Ă peu prĂšs 4h. Puis, je sors du Vondelpark pour longer les canaux đ. Je passe ensuite le panneau "5 km". Le "BIP" Ă ma montre indique 27 minutes et 50 secondes. Je suis dans les temps đ.
Je raisonne toujours "step by step" đ¶ââïž. Du coup, le prochain jalon qui mâattend est celui du km 6,5, oĂč je suis censĂ© voir mes parents. Je commence Ă ouvrir les yeux au km 6, mais il y a Ă©normĂ©ment de monde venu nous encourager. Je sais que je dois les voir Ă droite, je jette donc un coup d'oeil đïž. Je finis par repĂ©rer la veste jaune poussin de mon pĂšre đŽ. Je les vois, je souris, ils mâencouragent et je continue dâavancer. Ce ne sont que quelques secondes... Mais ça boost ! đ«¶
Prochaine Ă©tape : le km 9 oĂč je dois prendre mon premier gel. Ă ce moment-lĂ , on est sur une petite boucle dans un quartier rempli de grands buildings đïž. Au loin, en face, je vois les gens qui en sont au km 9. Il commence ensuite Ă pleuvoir, mais ce nâest pas si dĂ©sagrĂ©able que ça. Au contraire, ça me donne mĂȘme un petit coup de boost. Je prends alors mon gel. Je respire profondĂ©ment pour ne pas choper de point de cĂŽtĂ© et je pense au prochain jalon : le 10Ăšme km. J'entends un "BIP" venant de ma montre âïž. J'ai mis 27 minutes et 36 secondes. Je suis dans les temps ! đ
On se prend la sauce đŠ, et encore une fois, jâapprĂ©cie assez ! Ă ce stade, mes jambes avancent toutes seules. Elles ont choppĂ© le rythme et vivent tranquillement leur vie đŠż. Toutefois, je regarde rĂ©guliĂšrement ma montre pour ne pas trop me laisser emporter, car je sais que tout excĂšs de confiance risque de se payer trĂšs cher sur la fin.
Jâai de la peine pour un couple qui nous encourage sur le cĂŽtĂ©, car leur banderole en tissu est trempĂ©e et placardĂ©e contre leur face Ă cause du vent đ„č. Au km 13,5, je retrouve mes parents et on procĂšde au premier Ă©change de flasque. Câest lĂ que jâarrive au passage que je redoute : le long aller-retour de 10 km au bord du canal. On passe le km 15 et ma montre bipe. 27 minutes et 30 secondes, toujours dans les temps ! đ
Je mâĂ©tais dit que je sortirai mes Ă©couteurs Ă ce moment-lĂ đ§. Mais au final, je me sens bien. Jâai un rythme rĂ©gulier et le temps ne me semble pas plus long que ça. Donc, je choisis de ne pas le faire car jâai peur que la musique ne me dĂ©rĂšgle mon rythme. Je regarde le paysage et les trĂšs belles maisons qui se trouvent le long du canal. Il y a une animation de flyboard dans lâeau. Je regarde une dame faire des loopings et ça mâamuse đ„°. Je me dis quâon pourrait faire ça dans la Seine pour le Marathon de Paris... Si on n'avait trop pas peur de chopper le cancer en trempant un doigt de pied dans lâeau đŹ.
Je prends mon deuxiĂšme gel au km 19 et je regarde avec envie les hommes qui sâarrĂȘtent pour pisser debout le long des haies⊠Jâaimerais bien faire ça aussi mais je nâai pas particuliĂšrement envie dâĂȘtre lâattraction du public đ« . On arrive ensuite sur le pont qui marque le demi-tour. Il sâest remis Ă pleuvoir, mais il y a tellement de monde pour nous encourager que cette portion du marathon est vraiment gĂ©nial đ. Ma montre bipe de nouveau au km 20 : 27 minutes et 15 secondes. "Bon, ça commence Ă faire un peu trop dâavance sur les 27 minutes et 35 secondes de prĂ©vues". Je me dis quâil faut que je lĂšve le pied pour ne pas le payer trop cher aprĂšs đ«ą.
On quitte le canal pour se renfoncer dans la ville. Je guette le km 26, oĂč je sais que je vais voir mes parents et Ă nouveau changer de gourde. Une fois le changement fait, jâai encore plutĂŽt la pĂȘche đ, mĂȘme si je sens que je commence Ă ĂȘtre moins fraĂźche quâau dĂ©but.
Je prends mon troisiĂšme gel au km 28. Jâai plus de mal Ă le manger que les autres, donc je prends mon temps. Ăa commence Ă piquer un peu quand il se remet Ă pleuvoir. Mais câest fou : chaque goutte de pluie me redonne de lâĂ©nergie. Alors, jâaccueille la saucĂ©e avec beaucoup dâamour ! đ©· On arrive ensuite au km 30. Ma montre sonne et signale 27 minutes et 27 secondes. Je suis toujours nickel niveau timing đźâđš.
Je sais que la course commence maintenant. Comme dit "Campus Coach" : avant câĂ©tait juste lâĂ©chauffement (đ). Ăa devient dur de tenir le rythme. LâidĂ©e allĂ©chante de mâarrĂȘter marcher commence Ă pointer le bout de son nez Ă intervalles rĂ©guliers. Mais Ă chaque fois, je me force Ă terminer le kilomĂštre en me disant :
continue au moins à courir sur celui-là , on verra au prochain ».
Je raisonne kilomĂštre par kilomĂštre pour ne pas me miner le moral đ. Mais je sais que le moment de facilitĂ© est derriĂšre moi et quâil va falloir serrer les dents jusquâĂ la fin. Au km 35, je vois que j'ai mis 28 minutes et 2 secondes pour faire les derniers 5 km. Jâai perdu un peu plus de 30 secondes par rapport Ă mon dernier chrono â±ïž. Mais je relativise parce que je suis toujours dans la fourchette des 4h que je me suis fixĂ©e.
Je me demande ce que je fous lĂ ! Quelle idĂ©e de merde de sâinfliger ces conneries ! đ Jâai envie de marcher, mais je sais que si je craque, jâaurai Ă©normĂ©ment de mal Ă repartir. Alors jâessaye de garder un rythme, mĂȘme si jâai ralenti. Je m'interdis de ralentir au-delĂ de 5â45 - 5â50 du km (jâĂ©tais en 5â25 - 5â30 sur le dĂ©but de la course đ©). Je me rassure en me disant que jâai pris suffisamment dâavance en dĂ©but de course pour craquer un peu. En thĂ©orie, jâai environ 5 minutes de rab đïž sur le sub 4h. Au 36Ăšme km, je vois mes parents. Ma gourde est Ă moitiĂ© pleine, je n'ai pas besoin de la changer. Je suis crispĂ©e et leur fais signe que ça devient dur.
Au km 37, j'utilise mon dernier gel. Le coup de boost fonctionne, cette fois-ci (cafĂ©inĂ© âïž). Je nâen consomme quâune partie, car jâai vraiment du mal Ă manger et mâaccrocher Ă la vie en mĂȘme temps đ. Peu de temps aprĂšs, les drapeaux 4h me dĂ©passent. Ăa, ça me met un sacrĂ© coup de stress ! đ§ Je me dis quâil faut que je mâaccroche Ă eux, que je nâai pas le droit de les lĂącher. Sâen suit un long serrage de molaire et un "fuis moi je te suis, suis moi je te fuis" avec les drapeaux. DĂšs quâils me redĂ©passent, ça me met un coup de jus. Clairement, lâangoisse de les perdre de vue est plus forte que la motivation de passer lâarche ! đ L'un dâentre eux se retourne alors et me dit quelque chose en nĂ©erlandais đłđ±. Je ne comprends absolument rien compris mais jâacquiesce quand mĂȘme, dans le doute. On arrive au km 40 et je bipe ma montre. Le rĂ©sultat donne 29 minutes et 18 secondes. Jâai sacrĂ©ment ralenti đą mais je nâai pas explosĂ© non plus.
La fin est proche, et pourtant, elle me semble extrĂȘmement loin. Alain, qui porte le drapeau 4h, crie « 2 kilometers ! ». Je ne sais pas si jâai envie de lâembrasser ou de le claquer. On se retrouve dans le parc đł que lâon avait traversĂ© au dĂ©part. La boucle est en train dâĂȘtre bouclĂ©e đ. Je sens la fumĂ©e dâun mec qui fume sur le cĂŽtĂ© en encourageant. Ăa me fout la rage mais je nâai pas suffisamment dâĂ©nergie pour mâĂ©nerver, alors je lâinsulte seulement dans ma tĂȘte.
Il reste environ 1 km. Les drapeaux accĂ©lĂšrent, alors jâaccĂ©lĂšre aussi. Visiblement, jâen suis capable (pour le moment). On rentre ensuite dans le stade đïž, d'oĂč on voit presque lâarche. Je passe le panneau « 200 m » et là ⊠panne dâĂ©lectricitĂ© ! IL FAIT TOUT NOIR â«ïž. Mes jambes ralentissent dâun coup, comme si jâavais serrĂ© le frein Ă main. Impossible de les pousser Ă quoi que ce soit, elles se sont mises en grĂšve. Jâavance alors comme je peux jusquâĂ la ligne dâarrivĂ©e jusqu'Ă ce que jâentende le speaker dire « raise your hands » đ. Alors, je lĂšve les bras en arrivant sous lâarche, mais mon Ăąme a dĂ©jĂ quittĂ© mon corps . Câest ridicule, on dirait un fantĂŽme sous Xanax đ».
Je lâai fait ! Je suis pliĂ©e en deux mais je lâai fait. Jâai du mal Ă retrouver mes esprits. Dans un moment de luciditĂ©, je vois Alain, lâun des drapeaux, et je lui demande une photo souvenir đž. Puis, jâessaye de me diriger vers les mĂ©dailles, mais je titube comme si jâĂ©tais Ă 4 grammes đș. Alors je fais des pauses. Il me faudra environ 20 min pour arriver jusquâĂ elles (Ă 200 m de lâarrivĂ©e). Jâai quelques moments dâabsence oĂč je rĂ©alise Ă quel point je me suis poussĂ©e Ă bout. Jâai mal... Mais je suis fiĂšre ! đ
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